Concilier le monde et la voie spirituelle : une utopie ? 💫🌳
Oṃ!
Le chapitre 3 de la Bhagavad-gītā est consacré à l'action désintéressée, appelée कर्मयोग, karma-yoga. Śrī Kṛṣṇa y enjoint Arjuna d'agir avec l'attitude qu'il adopterait pour réaliser un rituel védique, यज्ञ, yajña, c'est-à-dire avec un profond sens des responsabilités et sans attachement au résultat ni même à l'action elle-même.
Le but ultime de l'action, qu'elle soit védique ou non (dans le cas d'Arjuna, combattre sur un champ de bataille) est de préparer la personne à la connaissance de soi.
Cette préparation est nécessaire pour que la connaissance déploie tous ses fruits, car notre tendance à nous approprier des ressources et mérites qui ne nous reviennent pas vraiment représente un obstacle majeur sur le chemin spirituel. Le sacrifice nous aide à évoluer sur ce point.
Certes, nos actions sont nécessaires pour obtenir des résultats, mais ces résultats dépendent toutefois essentiellement de facteurs sur lesquels nous n'avons aucune influence, comme les propriétés du sol et les conditions climatiques dans le cas d'une récolte, ou l'organisation de la société toute entière (système scolaire et universitaire, infrastructures, origine sociale, genre attribué, etc.) pour nos qualifications et nos revenus.
L'attitude la plus juste consiste donc à reconnaître que ce que nous considérons comme nous appartenant (possessions matérielles, connaissances, etc.) provient en premier lieu de l'univers (verset 13).
Cela permet de réduire notre attachement au monde matériel et nous prépare doucement à envisager notre véritable nature comme se situant au-delà de ce que nous croyons être généralement, c'est-à-dire notre corps et notre personnalité (et toutes les expériences associées, plaisantes ou non).
Pour nous aider à comprendre l'importance de cette attitude, Śrī Kṛṣṇa décrit dans les versets 14 et 15 la place du rituel védique dans le cycle de la vie sur Terre : « De la nourriture proviennent les êtres, la nourriture pousse grâce à la pluie, la pluie est le fruit des rituels, les rituels naissent de l’action (védique). Sache que l’action provient des Védas, et les Védas de l’impérissable (ब्रह्मन्, brahman, la réalité absolue). Par conséquent, l’absolu omniprésent réside toujours dans le rituel (यज्ञ, yajña, sacrifice). »
Le rituel, le sacrifice décrit dans les Védas ou, au sens large, l'action désintéressée, a ici le statut de loi de la nature – en son absence, point de pluie, et donc pas non plus de vie sur Terre.
Cela pourrait paraître un peu trop exotique pour nos esprits cartésiens si la catastrophe écologique et climatique que nous connaissons n'était pas directement liée à la société de consommation et ses valeurs d'appropriation des ressources sans contrepartie. Pour mieux comprendre, on pourrait imaginer un cycle de consommation désintéressée : ce serait un système dans lequel on rendrait à la Terre, aux animaux et aux peuples au moins autant que ce que nous prenons. On pourrait alors parler de cohabitation davantage que de consommation, et l'équilibre écologique et climatique serait préservé.
Ces versets indiquent également que l'évolution spirituelle n'est possible que grâce au sacrifice, car celui-ci provient des Védas, qui sont la manifestation la plus pure et directe de la réalité absolue, ब्रह्मन्, brahman. Le sacrifice (le rituel védique ou, dans notre cas, l'action désintéressée) permet donc de se « rapprocher » de l'absolu. Nous pouvons le vérifier, car dès que nous ne sommes plus obnubilé·e·s par notre personne et ses « besoins », nous laissons entrer une conscience plus fine, plus paisible, plus universelle dans nos vies.
Śrī Kṛṣṇa indique d'ailleurs au verset 16 que quiconque se soustrait à ce cycle de la vie, obsédé·e par les plaisirs immédiats, se prive de tout accomplissement matériel et spirituel.
Arjuna est donc fortement incité à accomplir sa mission, quand bien même sa tâche lui semble peu noble.
Inversement, pour la personne qui réalise sa véritable nature (après avoir bien préparé son mental par le sacrifice), il n'y a plus aucune action à réaliser. Cette personne est parfaitement satisfaite sans agir, sans rien accomplir.
Pourquoi en va-t-il ainsi ?
La Bhagavad-gītā promeut-elle une différence de traitement ?
Vous connaissez peut-être la réponse ; c'est ce que nous verrons dans notre prochain cours et notre prochaine lettre.
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Sophie